Lorsque l'on veut produire des sons, on a le choix entre deux méthodes de base :
La solution voyelle est celle qui produit la plus forte intensité. Si vous voulez, dans la rue, attirer l'attention de quelqu'un, il vaudra mieux produire une voyelle qu'une consonne.
En revanche, si nous allons ensemble au cinéma, et que je discute un peu trop pendant le film, vous me ferez taire discrètement en disant:
Il y a plusieurs façons de réaliser un obstacle: la méthode utilisée s'appelera mode d'articulation.
Le lieu d'articulation dépend de l'endroit où l'obstacle est réalisé. Cet endroit dépend de l'organe utilisé.
Pour décrire une consonne, on précisera:
La première façon de réaliser un obstacle, c'est d'empêcher l'air de passer complètement. L'air s'accumule alors derrière l'obstacle, la pression augmente, et lorsqu'elle atteint une valeur suffisante, l'obstacle cède, et l'air sort brusquement en produisant une explosion. On appelera une consonne produite de cette façon une occlusive
obstacle total ⇒ occlusive
Il y a, en français, plusieurs occlusives:
La seconde façon est de réaliser un passage étroit, si étroit que l'air ne peut passer qu'en frottant fortement sur les parois. L'air produit des tourbillons, et le tout produit un bruit.
On appelera une consonne produite ainsi une constrictive.
obstacle partiel ⇒ constrictive
Il y a plusieurs constrictives en français:
Pour certaines autres consonnes, un organe capable de vibrer (la pointe de la langue, ou la luette) s'oppose au passage de l'air. Le courant d'air repousse l'obstacle, mais celui-ci, tendu, se met à vibrer. On appelle ces consonnes des vibrantes.
Le français en connaît deux:
La première correspond au /r/ des paysans ou gendarmes de comédie, la seconde au /r/ qui vibre lorsque l'on est énervé, et que l'on dit "J'en ai marre!", beaucoup d'air sortant de la bouche et faisant vibrer la luette.
Enfin, une consonne est réalisée au moyen d'un obstacle partiel, placé de telle façon que l'air sort par les côtés de cet obstacle. Avant la fin de la réalisation, l'obstacle cède, produisant un léger bruit. Cette consonne se nomme latérale. Il s'agit de la consonne:
------------------------Les consonnes sont classées également selon l'endroit où se réalise l'obstacle.
Voici un schéma de la cavité buccale, comportant les noms de l'endroit où l'obstacle est formé:
Voici les adjectifs qui servent à nommer les consonnes:
Parmi les consonnes, nous aurons:
1. des bilabiales occlusives:
L'obstacle total est formé par les deux lèvres. La position de la langue n'est pas importante.
2. des labiodentales constrictives:
Les dents supérieures viennent toucher la lèvre inférieure.
Il n'est pas possible de faire un obstacle total, parce que de l'air passe toujours entre la lèvre et les dents.
La position de la langue n'est pas importante.
3. des apico-alvéolaires:
La pointe de la langue entre en contact (occlusives, vibrante, latérale) avec les alvéoles, ou s'en approche (constrictives)
Ce lieu d'articulation est très fréquenté, puisqu'on y rencontre
4. des palatales:
la langue vient toucher le palais (occlusive), ou s'en rapproche(constrictive).
5 . des vélaires:
le dos de la langue vient toucher le voile du palais :
Les phonèmes [k] et [g] sont des palatales devant des voyelles articulées à l'avant de la bouche, comme [i], et des vélaires devant des voyelles articulées à l'arrière, comme [u].
6. des uvulaires:
le dos de la langue se rapproche de la luette:
Soit la luette se met à vibrer, et on aura la consonne vibrante [ʀ], soit l'air se contente de frotter entre la langue et la luette, et on aura la consonne constrictive [ʁ], avec ou sans vibration des cordes vocales.
Voici les consonnes replacées sur leur point d'articulation:
--------------------------------------Le premier problème vient du fait que les différentes langues n'ont pas la même façon d'articuler les occlusives sourdes:
✷ Le Français:
✷ L'Allemand :
Ce problème ne serait pas très important si ce [h] ne faisait pas partie d'un système.
Il est banal de dire qu'en français, les consonnes sourdes et sonores s'opposent. Par exemple, poisson et boisson ne s'opposent que par le [p], qui est sourd, et le [b], qui est sonore. Tout le reste est identique. Nous savons, en effet, que [b] est un [p] sonore. L'oscillogramme n° 3 le montre bien: pour [ba], la ligne n'est plus plate: il y a une vibration, qui correspond à l'activité des cordes vocales.
La différence entre [p] et [b] est donc fondamentalement une différence sourde / sonore.
Notons aussi deux différences annexes:
Pour la réalisation allemande de [b], il n'y a pas de vibrations avant l'explosion de l'occlusive. Ainsi, le /b/ est réalisé sans vibration des cordes vocales. Ce /b/ allemand est donc un /p/ français.
En fait, il y a des Allemands qui réalisent les occlusives sonores comme les Français, d'autres, les plus nombreux, les réalisant sourdes. Donc, pour les Allemands:
La différence fondamentale entre /p/ et /b/, c'est que [p] est réalisé avec un souffle [ph], alors que /b/ est réalisé sans souffle, [b] ou [p].
Vous voyez sans peine le problème qui se pose pour le [p], que les Français identifient comme un /p/, alors que les Allemands l'identifient comme un /b/.
Si une Allemande (ou encore une Autrichienne ou une Suissesse alémanique) commande une bière dans un café, et qu'elle ne parle pas trop bien le français, elle peut très bien commander: [ynpjɛR], ce qui amènerait le garçon à comprendre: une pierre. Heureusement, les pierres ne font pas partie des boissons disponibles, si bien qu'il ne s'en rendra sans doute pas compte.
Le problème serait différent si cette cliente de café travaillait sur un chantier, où se trouvent aussi bien des pierres que des bières.
Le problème révèle toute son ampleur si l'on essaie de trouver d'autres exemples:
et si l'on sait que la différence entre sourdes et sonores n'existe guère pour les constrictives allemandes, , le problème devient encore plus inquiétant:
Le coup de glotte /?/ est une consonne occlusive sourde laryngale. Cela signifie que l'occlusion est faite par la fermeture des cordes vocales, comme quand on veut tousser.
En allemand, il n'y a pas de mot qui commence, oralement parlant, par une voyelle. En effet, un mot comme Aachen (=Aix-la-Chapelle) se prononce /?a:xn/.
Le français n'utilise le coup de glotte que dans un cas spécial: lorsqu'il veut produire une voyelle très forte. Par exemple, si un enfant traverse devant un autobus, on va crier: « attention! » en faisant précéder le /a/ d'un coup de glotte, ce qui lui donnera une amplitude beaucoup plus grande.
Dans les autres cas, le français ignore le coup de glotte. Cela lui pose d'ailleurs des problèmes lorsqu'il y a contact entre deux voyelles, que l'on nomme hiatus. Le passage d'une voyelle à une autre est difficile, car on entend toutes les positions prises par la langue passant de la position de la premières voyelle à la position de la deuxième.
Pour éviter ce choc, la langue a recours à plusieurs méthodes:
En revanche, le locuteur allemand, qui va utiliser un coup de glotte, même en français, n'aura pas besoin de faire de liaison, puisqu'il place, devant les mots qui commencent par une voyelle, la consonne [ʔ].
On conviendra que ce coup de glotte ne facilite pas l'apprentissage correct du français. Ainsi, le locuteur allemand dira sans sourciller [ilʔaRiv] pour [ilzaRiv], mettant un pluriel au singulier.
Vous avez déjà compris que nous retrouverons tous ces problèmes dans divers autres chapitres.
Le problème des sourdes / sonores, que nous avons largement abordé à propos des occlusives, atteint aussi les constrictives.
[s] [z]
Le problème est encore plus grave lorsqu'il atteint les liaisons, surtout celles qui traduisent le pluriel:
[ z ] [ s ]
Le /r/ est un problème pour les anglophones, qui ont un /r/ à un seul battement, qui font qu'on les reconnait de loin.Mais le /r/ placé après voyelle, en fin de syllabe, est encore plus problématique.
En effet, les anglophones et les germanophones réalisent le /r/ en position finale comme une voyelle, ou, après un /a/ ou un /o/, se contentent d'allonger la voyelle.
En français, le /r/ vocalique est inconnu, et il passe inaperçu. Cela revient à ignorer tous les /r/ après voyelle.
Par exemple, le mot porte [pɔʁt] devient alors [po:t], que le Français identifie comme pote (=ami, en langage familier), le mot sorte [sɔʁt] devient [so:t], sotte, etc...
Cette faute est d'autant plus ennuyeuse que le /r/ est le son le plus employé du français, et qu'il se retrouve mêlé à la conjugaison (sortirent), et dans les terminaisons féminines d'adjectifs (fière, primesautière) et de noms de métiers (boulangère, couturière, meunière), sans compter les mots masculins en -eur...
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