phonétique


Les consonnes

Lorsque l'on veut produire des sons, on a le choix entre deux méthodes de base :

  • on peut faire vibrer les cordes vocales, et la bouche reste assez ouverte pour que l'air puisse sortir sans être gêné. C'est le cas lorsque l'on prononce [a] ou [i]. L'air sort sans obstacle, et l'on produit donc une voyelle.
  • on peut aussi mettre un obstacle sur le chemin de l'air. L'obstacle gêne alors l'air. Cet air produit un bruit de frottement [s], ou une explosion [p]. Comme il y a création d'obstacle, nous avons affaire à une consonne.
  • on peut bien sûr également combiner les deux méthodes. C'est le cas lorsque l'on prononce [b] ou [z].

La solution voyelle est celle qui produit la plus forte intensité. Si vous voulez, dans la rue, attirer l'attention de quelqu'un, il vaudra mieux produire une voyelle qu'une consonne.

  • Eh! Houhou! et au téléphone Allo!

En revanche, si nous allons ensemble au cinéma, et que je discute un peu trop pendant le film, vous me ferez taire discrètement en disant:

  • chut, [ʃt] où le {u} n'est pas prononcé.

Il y a plusieurs façons de réaliser un obstacle: la méthode utilisée s'appelera mode d'articulation.

Le lieu d'articulation dépend de l'endroit où l'obstacle est réalisé. Cet endroit dépend de l'organe utilisé.

notons Notons :

Pour décrire une consonne, on précisera:

  • son mode d'articulation
  • son lieu d'articulation
  • si les cordes vocales vibrent (sonore) ou non (sourde)
  • si l'air passe par le nez et fait vibrer les fosses nasales (nasale) ou non (orale).


1.1.description


1.1.1. Le mode d'articulation

La première façon de réaliser un obstacle, c'est d'empêcher l'air de passer complètement. L'air s'accumule alors derrière l'obstacle, la pression augmente, et lorsqu'elle atteint une valeur suffisante, l'obstacle cède, et l'air sort brusquement en produisant une explosion. On appelera une consonne produite de cette façon une occlusive

Règle :

obstacle totalocclusive

Il y a, en français, plusieurs occlusives:

Tableau des occlusives


La seconde façon est de réaliser un passage étroit, si étroit que l'air ne peut passer qu'en frottant fortement sur les parois. L'air produit des tourbillons, et le tout produit un bruit.

On appelera une consonne produite ainsi une constrictive.

Règle :

obstacle partielconstrictive

Il y a plusieurs constrictives en français:

Tableau des constrictives

Pour certaines autres consonnes, un organe capable de vibrer (la pointe de la langue, ou la luette) s'oppose au passage de l'air. Le courant d'air repousse l'obstacle, mais celui-ci, tendu, se met à vibrer. On appelle ces consonnes des vibrantes.

Le français en connaît deux:

Tableau des vibrantes

La première correspond au /r/ des paysans ou gendarmes de comédie, la seconde au /r/ qui vibre lorsque l'on est énervé, et que l'on dit "J'en ai marre!", beaucoup d'air sortant de la bouche et faisant vibrer la luette.

Enfin, une consonne est réalisée au moyen d'un obstacle partiel, placé de telle façon que l'air sort par les côtés de cet obstacle. Avant la fin de la réalisation, l'obstacle cède, produisant un léger bruit. Cette consonne se nomme latérale. Il s'agit de la consonne:

Tableau de la latérale

------------------------


Les consonnes (2)


1.1.2. Le lieu d'articulation

Les consonnes sont classées également selon l'endroit où se réalise l'obstacle.

Voici un schéma de la cavité buccale, comportant les noms de l'endroit où l'obstacle est formé:

Les lieux d'articulation

Voici les adjectifs qui servent à nommer les consonnes:

Adjectifs des lieux d'articulation

Parmi les consonnes, nous aurons:

1. des bilabiales occlusives:

bilabiale


L'obstacle total est formé par les deux lèvres. La position de la langue n'est pas importante.

bilabiales

2. des labiodentales constrictives:

labio-dentale


Les dents supérieures viennent toucher la lèvre inférieure.

Il n'est pas possible de faire un obstacle total, parce que de l'air passe toujours entre la lèvre et les dents.

La position de la langue n'est pas importante.

labiodentales

3. des apico-alvéolaires:

labio-dentale

La pointe de la langue entre en contact (occlusives, vibrante, latérale) avec les alvéoles, ou s'en approche (constrictives)

Ce lieu d'articulation est très fréquenté, puisqu'on y rencontre

  • des occlusives : [t, d, n]
  • des constrictives : [s, z]
  • une latérale : [l]
  • une vibrante : [r] , qui se rencontre dans certaines régions: Bourgogne, Sud-ouest

apico-alvéolaires

4. des palatales:

dorsopalatale


la langue vient toucher le palais (occlusive), ou s'en rapproche(constrictive).

  • pré-palatales: la langue se rapproche de la partie avant du palais,
  • médio-palatales: la langue se rapproche de la partie médiane du palais,
  • post-palatales: la langue se rapproche de la partie postérieure du palais.
  • palatales

    5 . des vélaires:

    dorso-vélaire


    le dos de la langue vient toucher le voile du palais :

    Les phonèmes [k] et [g] sont des palatales devant des voyelles articulées à l'avant de la bouche, comme [i], et des vélaires devant des voyelles articulées à l'arrière, comme [u].

    vélaires

    6. des uvulaires:

    uvulaire


    le dos de la langue se rapproche de la luette:

    Soit la luette se met à vibrer, et on aura la consonne vibrante [ʀ], soit l'air se contente de frotter entre la langue et la luette, et on aura la consonne constrictive [ʁ], avec ou sans vibration des cordes vocales.

    uvulaires

    Voici les consonnes replacées sur leur point d'articulation:

    consonnes replacées

    --------------------------------------


    1.2.problèmes posés par les consonnes


    1.2.1. problèmes des occlusives

    Sourdes / sonores

    Le premier problème vient du fait que les différentes langues n'ont pas la même façon d'articuler les occlusives sourdes:

    ✷ Le Français:

    1. ferme les lèvres et les cordes vocales,
    2. presse l'air contenu dans les poumons. Cet air presse contre les cordes vocales. Sous la pression, le larynx remonte légèrement. La pression de l'air placé entre les cordes vocales et les lèvres augmente légèrement.
    3. ouvre les lèvres. L'air enfermé entre les cordes vocales et les lèvres sort en explosant. Comme la pression est faible, l'explosion l'est aussi. Comme les cordes vocales sont fermées, elles sont tendues, et peuvent se mettre à vibrer instantanément.

    ✷ L'Allemand :

    1. ferme les lèvres, mais laisse les cordes vocales ouvertes.
    2. presse l'air contenu dans les poumons. Cet air passe entre les cordes vocales et vient presser contre les lèvres. La pression de l'air est forte, car les poumons ont de la force.
    3. ouvre les lèvres. L'air sort en explosant. Comme la pression est forte, l'explosion l'est aussi. Comme les cordes vocales sont ouvertes, elles ne sont pas encore tendues. Elles se tendent donc pour vibrer. Pendant le temps qu'elles mettent à se tendre, de l'air continue à sortir. Les cordes vocales, en se fermant, créent un obstacle partiel, si bien que l'air produit un bruit. Ce bruit n'est autre qu'un souffle s'apparentant au [h], et qui représente cette aspiration caractéristique des langues germaniques.

    Ce problème ne serait pas très important si ce [h] ne faisait pas partie d'un système.

    Il est banal de dire qu'en français, les consonnes sourdes et sonores s'opposent. Par exemple, poisson et boisson ne s'opposent que par le [p], qui est sourd, et le [b], qui est sonore. Tout le reste est identique. Nous savons, en effet, que [b] est un [p] sonore. L'oscillogramme n° 3 le montre bien: pour [ba], la ligne n'est plus plate: il y a une vibration, qui correspond à l'activité des cordes vocales.

    La différence entre [p] et [b] est donc fondamentalement une différence sourde / sonore.

    Notons aussi deux différences annexes:

    • la constrictive sourde est prononcée avec plus d'énergie que la sonore.
    • la constrictive sourde est plus longue que la sonore. En effet, la phase où la pression d'air augmente ne peut durer très longtemps si les cordes vocales vibrent, puisque, pour chaque vibration, un peu d'air franchit le larynx. L'air s'accumulant entre le larynx et les lèvres, la pression au-dessus des cordes vocales finit par être aussi élevée que la pression au-dessous, ce qui finit par bloquer le mouvement des cordes vocales, qui ne peuvent plus se soulever.

    Pour la réalisation allemande de [b], il n'y a pas de vibrations avant l'explosion de l'occlusive. Ainsi, le /b/ est réalisé sans vibration des cordes vocales. Ce /b/ allemand est donc un /p/ français.

    En fait, il y a des Allemands qui réalisent les occlusives sonores comme les Français, d'autres, les plus nombreux, les réalisant sourdes. Donc, pour les Allemands:

    La différence fondamentale entre /p/ et /b/, c'est que [p] est réalisé avec un souffle [ph], alors que /b/ est réalisé sans souffle, [b] ou [p].

    p et b

    Vous voyez sans peine le problème qui se pose pour le [p], que les Français identifient comme un /p/, alors que les Allemands l'identifient comme un /b/.

    Si une Allemande (ou encore une Autrichienne ou une Suissesse alémanique) commande une bière dans un café, et qu'elle ne parle pas trop bien le français, elle peut très bien commander: [ynpjɛR], ce qui amènerait le garçon à comprendre: une pierre. Heureusement, les pierres ne font pas partie des boissons disponibles, si bien qu'il ne s'en rendra sans doute pas compte.

    Le problème serait différent si cette cliente de café travaillait sur un chantier, où se trouvent aussi bien des pierres que des bières.

    Le problème révèle toute son ampleur si l'on essaie de trouver d'autres exemples:

    • bon / pont rade / rate poisson / boisson

    et si l'on sait que la différence entre sourdes et sonores n'existe guère pour les constrictives allemandes, , le problème devient encore plus inquiétant:

    • ils sont / ils ont | poisson / poison | cadeau /gâteau | cou / goût | car / gare

    le coup de glotte

    Le coup de glotte /?/ est une consonne occlusive sourde laryngale. Cela signifie que l'occlusion est faite par la fermeture des cordes vocales, comme quand on veut tousser.

    En allemand, il n'y a pas de mot qui commence, oralement parlant, par une voyelle. En effet, un mot comme Aachen (=Aix-la-Chapelle) se prononce /?a:xn/.

    Le français n'utilise le coup de glotte que dans un cas spécial: lorsqu'il veut produire une voyelle très forte. Par exemple, si un enfant traverse devant un autobus, on va crier: « attention! » en faisant précéder le /a/ d'un coup de glotte, ce qui lui donnera une amplitude beaucoup plus grande.

    Dans les autres cas, le français ignore le coup de glotte. Cela lui pose d'ailleurs des problèmes lorsqu'il y a contact entre deux voyelles, que l'on nomme hiatus. Le passage d'une voyelle à une autre est difficile, car on entend toutes les positions prises par la langue passant de la position de la premières voyelle à la position de la deuxième.

    Pour éviter ce choc, la langue a recours à plusieurs méthodes:

    • - élision d'une voyelle:
      • le + éléphant ➾ l'éléphant [lelefɑ̃]
      • la + auto ➾ l'auto [loto]
    • - réveil d'une consonne latente:(d'une consonne qui dort)
      • il pleut [ilplø] ⇒ pleut-il [pløtil]
      • les [le] ⇒ les âmes [lezam]
    • - insertion d'une consonne:
      • il va [ilva] ⇒ va-t-il[vatil]

    En revanche, le locuteur allemand, qui va utiliser un coup de glotte, même en français, n'aura pas besoin de faire de liaison, puisqu'il place, devant les mots qui commencent par une voyelle, la consonne [ʔ].

    On conviendra que ce coup de glotte ne facilite pas l'apprentissage correct du français. Ainsi, le locuteur allemand dira sans sourciller [ilʔaRiv] pour [ilzaRiv], mettant un pluriel au singulier.

    Vous avez déjà compris que nous retrouverons tous ces problèmes dans divers autres chapitres.

    1.2.2. problèmes des constrictives

    le [3] comme je

    le ge

    les sourdes et sonores

    Le problème des sourdes / sonores, que nous avons largement abordé à propos des occlusives, atteint aussi les constrictives.

    [s] [z]

    • la rose [laʁoz]→ la rosse [laʁos]
    • le poison [ləpwazõ] → le poisson [ləpwasõ]
    • le frison [ləfʁizõ] → le frisson [ləfʁisõ]
    • l'alaise [lalɛz] → la laisse [lalɛs]
    • saison [sɛzõ] → cessons [sɛsõ]

    Le problème est encore plus grave lorsqu'il atteint les liaisons, surtout celles qui traduisent le pluriel:

    [ z ] [ s ]

    • elles aiment [ɛlzɛm] → elles s'aiment [ɛlsɛm]
    • elles ont [ɛlzõ] → elles sont [ɛlsõ]
    • elles envoient [ɛlzɑ̃vwa] → elles s'envoient[ɛlsɑ̃vwa]

    les problèmes posés par le /r/

    Le /r/ est un problème pour les anglophones, qui ont un /r/ à un seul battement, qui font qu'on les reconnait de loin.Mais le /r/ placé après voyelle, en fin de syllabe, est encore plus problématique.

    En effet, les anglophones et les germanophones réalisent le /r/ en position finale comme une voyelle, ou, après un /a/ ou un /o/, se contentent d'allonger la voyelle.

    En français, le /r/ vocalique est inconnu, et il passe inaperçu. Cela revient à ignorer tous les /r/ après voyelle.

    Par exemple, le mot porte [pɔʁt] devient alors [po:t], que le Français identifie comme pote (=ami, en langage familier), le mot sorte [sɔʁt] devient [so:t], sotte, etc...

    Cette faute est d'autant plus ennuyeuse que le /r/ est le son le plus employé du français, et qu'il se retrouve mêlé à la conjugaison (sortirent), et dans les terminaisons féminines d'adjectifs (fière, primesautière) et de noms de métiers (boulangère, couturière, meunière), sans compter les mots masculins en -eur...

Pages à feuilleter...

<< précédente |<>| suivante >>

Pour travailler avec LESCOnet, il suffit de se mettre au travail.

L'utilisation en est gratuite...


La famille de LESCOnet :
Facebook

Logo